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Eau vive

4 janvier 2010

Son

Accroupie près de lui. Lui, en reflet de l'écran bleuté, où les drivers aux noms incongrus, bien rangés dans leurs colonnes, me font sourire.
Lui, là, dans ma maison, sur ma chaise, mon bureau, mon écran. Lui, là. Et la tendresse, la douleur, l'amour encore. L'envie de rire, de frotter son crane rasé qui râpait ma paume. L'envie de déposer ma tête, juste un instant. En fermant les yeux. En oubliant.  Non, ne pas fermer les yeux. Ne pas oublier. Chercher un café. Une raison. Fuir.  Et revenir, à peine un peu plus loin. Juste un peu. L'écouter, noter les hiéroglyphes informatiques.
Le regarder, si semblable à leur père, avec sa tête qui se rapprochait de l'écran pour mieux en cerner les mystères. Avec ses lunettes qui glissaient un peu. Vous ne trouvez pas qu'ils se ressemblent ? Et le garçon de passage qui fronce les sourcils. Il doit savoir. Ce passé décomposé avec cet inconnu que je ne présente pas. Il doit comprendre. Cet homme là, dont je ne dis pas le nom. Jamais.
Mon ordinateur a retrouvé sa voix.
Et ma raison me rend muette.

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31 décembre 2009

A l'eau

J'avais écouté ton message sur mon répondeur. Avais attendu, pour le faire, le plus longtemps possible. La musique qui t'est attribuée m'aide à savoir quand ne pas décrocher mon téléphone. Le petit, celui qui vibre au fond de mon sac, comme l'annonce ma voix qui n'a pas répondu. Il me faut avoir assez de forces pour le faire. Les réveillons, c'est encore trop dur pour moi.
J'ai reçu ta lettre aujourd'hui. Précieuse, avec cette carte choisie pour moi, comme son timbre.
Qui d'autre que Toi, pour m'écrire de ma ville ?
Je dictais mon numéro à un ami, et il le composait sur son clavier. A la première sonnerie j'ai décroché. Sans regarder le numéro.
Et ce souffle, ce soupir. Cet "allo" hésitant. Toujours hésitant. C'était Toi.
Je me suis cassé la gueule de ce pont sur lequel je défie mon océan familier de solitude. Ma voix s'est éraillée, comme toujours. Non non, tout allait bien. Tout. Et déjà tu regrettais d'avoir téléphoné chez moi. Tu t'étais promis qu'il ne fallait pas. Mais je suis une amie, n'est-ce pas ? Une simple amie, maintenant.
Tu avais peur de mon silence qui perdurait. Une semaine, cela est-il vraiment si long ? Tu as craint un accident de moto. Qu'aurais-tu fait, petit scarabée ? Expliqué à ta femme qu'une de tes amies proches avait besoin de ta visite ? Aurais cherché le numéro de l'hôpital ?
Que ta dernière nuit de cette année te sois belle. Comme toujours. Avec tes proches, tes amis. Ces gens que je ne connais pas.
Mes yeux ont perdu leur entrelacs salés.
Ma bouche s'est regonflée de sourires. Sculptés d'habitudes, impeccables, sans même que je n'ai besoin de les regarder.
Je vais partir les rejoindre. Eux, ces gens que tu ne connais pas.

Tu es content, tu as pu me souhaiter de passer de belles fêtes.

30 décembre 2009

Joyeux No-Elle

Cela a été sans moi.
Une pour s'en préoccuper.
- Mais au fait, maman, tu passes Noël avec qui ?
- Avec moi.
Seule, ça s'appelle comme ça.
Il y en a eu un pour m'envoyer un Sms, comme un spam
- "Joyeux Noël à vous ". C'est un peu dommage, je croyais qu'on se tutoyait tous les deux.
Il y a eu le vide plein de chantilly qui se volute sur des yaourts. Parce que j'aime ça quand le foie gras est de rigueur. Et les séances de hammam, pour me souvenir des odeurs de corps qui ne soient pas le mien. 
Et la visite à la mère-grand-mère trempée dans cet acide qui conserve si bien les aigreurs. La route sous la pluie, puis dans la nuit. Et les deux jeunes adultes dont aucun ne voulait prendre le volant. Et la mère qui gère son arthrose comme une petite vieille en devenir.
Il y a eu le lit retrouvé, la chaleur froide de la fenêtre ouverte vers le jardin. Les livres comme des squames d'autres vies plein les draps.
Il y a eu les mails. La fête à venir, à vomir. Mais j'irai. Du sourire plein les dents.
Je n'aime plus Noël. Et ce présent me survivra longtemps.
Mais je ne crois plus que les autres soient coupables d'égoïsme. Juste moi, responsable. D'avoir eu quatre enfants dont aucun n'a su prendre son téléphone pour imiter le bruit des cloches, dont aucun n'a déposé au pied du petit sapin en cône synthétique un bolduc pour celle qui n'a pas su leur apprendre.
Il y a parfois des heures qui s'étrennent dans un drôle de vide.
Ce sera sans moi.
Ah, oui !
Bonne année.

3 décembre 2009

Ça flotte

Ça flotte dans ma mémoire
Ça flotte sur les trottoirs
Ça rigole sale
en mots boueux

M'en fous, m'en balance, vous savez. Ça rime comme ça peut.
J'veux du saxo qui swingue comme des vieux souvenirs, du qui vibre dans les basses. Saxo ténor, et cuivre jaune aux lueurs chancelantes. Chandelle assassine des rêves de mes nuits, dans la salle qui a perdu son flou nimbé de fumée.

Il flotte des gouttes froides, ça rigole boueux sur mon visage.
J'veux pas qu'on me regarde, j'veux pas de bise, pas de conversations à la con. Avec ces mots que l'on partage avec n'importe quel quidam.
J'veux être une dame de cœur. Une royale que l'on empoisonne. Une qui baise le serpent au venin si doux.

Et ça transperce ma vie à chaque goutte de flotte.

20 novembre 2009

Mue

          Je le sais bien, nous ne faisons plus l'amour. Oh non, ce n'est pas ce mot là... tu as écrit "nous ne sommes plus amants"... quel mot coupant, quel mot cru. Pour nous, ce simple mot là.
Je l'ai décidé, pour laisser à l'inconnu "un possible". Tu vois, je suis bien optimiste. Et je sors, j'ai plein d'amis, tu sais. Plein.
Des vrais amis, qui m'aiment, et qui ne savent pas pourquoi j'ai parfois cette étrange tristesse qui me voile.
Mon corps le sait, qui laisse sa peau s'écailler de ne plus s'adoucir à tes paumes. Ma bouche le sait qui ne se gonfle plus de tes morsures. Moi tout entière le sait.
Te donner mon corps était trop facile. Et je me mépriserais encore et encore de me contenter de ce rien qui est si doux. Alors j'ai choisi.
Mais l'amour ne s'est pas évaporé de ne pas te posséder dans ta nudité... L'amour a perduré, au fil de nos mots,  de nos repas, de nos balades. Entre deux verres de bon vin, et quelques livres si rares que tu sais choisir pour moi.
Chez toi l'amour a mué.
Et j'en crève de ne même plus avoir ce cadeau merveilleux d'être, au moins, aimée autrement.

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19 novembre 2009

Enduit

Alors j'ai pris la truelle, celle dont le tranchant est parfait, celle au reflet lisse. Et j'ai remué la poudre blanche qui tourbillonnait dans l'eau. J'ai revêtu le tas posé au sol, collé de vieilles plaques de ciment, froid, et à l'odeur douceâtre de vieux plâtre.
J'ai tiré l'échelle. Et étalé l'enduit. Lissé, tiré, taloché, spatulé. 
Je parlais au mur tout cabossé des âges anciens. Lui disant doucement que j'aimais ses failles, que cette pâte onctueuse dont je poudrais son teint le rendrait juste un peu plus lisse, mais pas trop. Qu'il garderait ses rondeurs, son petit air penché que j'aime tant. Je lui disais que j'aimais le caresser de mes mains, en fermant les yeux, sentir ses aspérités, son odeur si particulière.
Quand je n'ai plus senti la douleur dans les bras, celle qui vrille le pouce droit, quand le froid a fini de raidir ma nuque, quand j'ai enfin oublié les heurts du temps qui passe, quand le mur au plâtre rose et bleu a été moucheté de blanc, alors j'ai pleuré. Sans sanglots, presque sans larmes. Juste avec le regard brûlant.
Et j'ai rangé les outils. Sucé la plaie au rouge salé.
Le temps creuse ses failles en moi et me laisse courbée, sans ses mains pour m'apaiser.

19 novembre 2009

Étain

Dans ses yeux j'avais disparu.
Une  cataracte avait terni ce reflet où je me trouvais si belle. Avant. Il y a longtemps.
Dans ses yeux, mes hanches en filigrane s'étaient dissoutes, et l'acide avait rongé le solfège où mon amour jouait une partition à quatre mains.
Dans ses yeux  plus de carafe de cristal où les liqueurs s'évaporaient en parfum d'ambre.
Dans ses yeux ... Je ne suis plus rien.
"Une amie", m'a-t-il dit. "Puisque nous ne sommes plus amants, quoi d'autre ? "
Et mon cœur s'est éteint.
Gris, mat et terne.
Broc d'airain, broc d'étain.
Si froid.
Soudain.
Dans mes yeux le sable frotte le glacis de mon amour toujours si doux. 

Note du traducteur
Aimer un Toi marié à une autre que Moi, et refuser de poursuivre ce chemin où nos corps se mêlaient depuis tant d'années. Refuser, pour continuer à s'aimer soi-même.

17 novembre 2009

Son âme ronde

Ma main sur ses arrondis, comme une amante, lissant de crème blanche ses flancs.
La lumière s'y reflète comme un ruisseau qui vagabonde, fuyant le rectiligne, se courbant en ondulant.
Je lui parle, caresse ses plaies, suit du bout des doigts les cicatrices qui la parent. Parfois je m'y cloue de tout mon corps, écartelant mes bras pour mieux la vivre en moi.
Je vis une histoire d'amour avec les murs de ma vieille maison. J'entends les échos des générations qui l'ont façonnée tour à tour, je panse les coups qu'elle a reçus. Je l'aime. Comme un ancêtre, comme une vieille femme dont le parfum un peu poussiéreux m'apaise. Je l'aime pour toutes ses rondeurs, ses éclats de cellulite, ses fractures.
Je la console de mes gestes qui la dénudent. Je veux la laisser belle pour ceux qui l'accompagneront. Je dois partir. Je dois fuir  un jour cette vie si rectiligne où je me cogne.
Et laisser cette maison dont l'âme ronde me sourit.

27 octobre 2009

Vestiaire

Ce matin je l'ai vu, qui se dandinait sans aucune décence dans le soleil levant. On ne voyait que lui.
Il s'est maquillé comme une folle ; son corps mince drapé de blanc cru, parsemé de quelques éclats dorés pour rajouter dans le clinquant. Mince et effilé, il a même un petit air efféminé. Tout en haut de sa tête, certainement pour fêter Halloween avant l'heure, il portait une perruque blonde flamboyante, qui ondoyait au moindre souffle. Quelle allure !
Lui qui incarne la sagesse a revêtu aujourd'hui une tenue de folle.
Mon bouleau a mis sa tenue d'automne.

23 octobre 2009

Qu'importe

Ne plus attendre, ni prétendre.
Ne plus avoir faim, soif, plus la peau resserrée sur la chair, au bord de la grève d'un lit trop grand.
Oublier les paillettes lumineuses au coin des iris dans un regard, les narines frémissantes de l'odeur unique et exquise, les caresses comme un nuage, comme un mistral.
Ne plus croire au noir de la nuit, au soleil de minuit qui éclaire mon sommeil trop profond pour être vrai, et maudire les étoiles en paillettes dans le seul reflet de mes yeux.
Qu'importe.

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