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Eau vive
1 septembre 2009

Sur la route

Tu es parti.
Avec  ton crâne balafré et ta violence au bout des poings. Parti, comme ça, pour tracer la route. Sans rien, sans savoir voir où. Au bout du monde, au bout de ton pays, au bout de ce nulle part où tu as toujours vécu.
Tu as 20 ans.
J'ai mal de ta silhouette aux muscles aigus comme des rasoirs. J'ai mal de ton regard qui ne veut pas de la vie telle que tu la vis. J'ai mal de t'avoir tenu dans mes bras, enfant. J'ai mal de ces mots... tu t'en souviens, de mes mots, n'est-ce pas ?
C'était un soir de Noël, ils t'avaient laissé sortir de l'hôpital, avec ton énorme bandage tout autour de la tête. Nous devions venir et tu ne voulais pas rester là-bas. Ta seconde trépanation. Tu avais 10 ans. Avant il y avait eu les fractures, les blessures, le danger, toujours à tes côtés.
Au pied de l'escalier je t'ai pris par le bras, juste pour te dire ce que je portais en moi :
"Fais attention à toi. Toutes ces blessures que tu t'infliges comme autant de cris, cet être que tu fractures, que tu maltraites, il est à toi. Personne ne t'aimeras plus parce que tu te seras blessé. Personne ne t'aimeras jamais plus que toi peut t'aimer. Je t'en prie, prends soin de toi. Je t'aime tel que tu es."
Et tu m'avais fait un grand sourire, un de ces sourires dont tu as le secret alors que tout s'écroule tout autour.
"Je sais que tu m'aimes, tatie, je sais."
Tu as scarifié ta peau, a frappé l'autre pour le simple fait de frapper. Tu as cassé, menti, volé, t'es drogué. Et tu as toujours su courir plus vite que les autres.
Je t'ai ouvert cette porte, cette chambre, pour te donner une autre chance de vivre et d'apprendre à aimer vivre. Auprès de tes cousins, cousines. Tu n'as pas pu, c'était trop dur, cette vie là.  Et tu es parti, encore une fois. Ailleurs. Puis encore ailleurs. De squat en squat jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne chez qui frapper.
Aujourd'hui tu n'es plus nulle part, dans cette vie à laquelle tu as choisi d'appartenir jusqu'à 25 ans. Avant de partir en dehors de toi. .
J'ai mal de cette douleur plantée tel un pieu en toi.
Je t'aimerai toujours.
Bonne route à toi.

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