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Eau vive
14 septembre 2007

La goutte d'airain

Je le sais bien, tu n'y peux rien. D'ailleurs tu ne peux pas savoir, comment pourrais-tu ? Je ne peux pas te parler, ni rire du sacrum en piteux état, et tempêter sur la moto où les araignées vont tisser leur toiles trois semaines durant.
Pas un mot de ce week-end où la solitude me mijote des heures longues.
Tu n'as pas entendu mes sanglots, quand j'ai trouvé sa chambre vide, et sa lettre. Oui, il est parti, la vie ici était trop dure pour lui. Tu l'aimais bien. Il m'a laissé une lettre tu sais, émouvante comme seuls les gamins perdus arrivent à écrire. Et ses sms après, juste pour rajouter les jtm qu'il avait oubliés.
Mais tu ne sais pas tout ça. Tu ne sais rien, de ma vie de ces moments là. Puisque tu n'es pas là.
Et pourtant je sais bien que cet instant là est perdu, il se meurt, broyé dans un coeur trop lourd de ces heures vides. Ces secondes s'échappent, où je t'aurais donné tout ce que je suis aussi, et qui se terre si souvent en silence. Quand je reste là, si démunie et fragile. Avec mes sanglots que je ne cherche pas à taire. Avec cette cigarette qui s'embrase et mes doigts qui s'échappent de mes pensées. Devenue un simple contour, statue de marbre incolore, assise, les yeux vides. Lourde, si lourde et éphémère tout à la fois.
Je me serrais glissée dans tes bras et tu m'aurais entendue murmurer serre-moi fort, très très fort, s'il te plaît, j'en ai tellement besoin.
C'est un drôle de moment, qui me scelle d'une goutte d'airain, pour taire à jamais mes besoins.
Tu n'es pas là. Et tu me manques.

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12 septembre 2007

Vivoter

Parmi eux, vitrifiant leurs nuits de frissons transparents, grapillant les grains soyeux pour remplir de velours leurs jours, parmi eux, vivant comme s'ils allaient mourir demain.
Vivoter. Ôte toi de là, ma vie, vite, Oviv est morte, vive l'eau vive. Ou alors je suis immortelle.
Je ne mourrai pas demain, je ne mourrai jamais : survivante à ma vie passée, c'est déjà beaucoup.
Alors je continue, en eau vive stagnante, odorante cancoillotte sur tranches de jours étalées au couteau. Je poursuis, parce qu'il n'y a que les poissons morts qui se laissent porter par le courant,  érotiquement amante sur canapé fané à tapoter après, sombrant en comas artificiels de mots jusqu'à salir ma bouche, ma couche, rêvotant mes nuits d'amnésies en oublis, hurlant pour effrayer les amants perdus et les aimants déboussolés.
Rien en tambours héroïques, symphonie d'outre-vie, rien en silences non plus. Je les entends, les battements sourds de cet organe recouvert d'une cagoule. C'est cela, j'ai le cœur encapsulé de stretch. Il est frileux, le lâche ! Il s'étire un peu puis revient sagement à sa place. J'ai l'amour élastique, qui reste preste et vivace tant que personne ne le voit. J'affadis les lumières et refroidis les ardeurs, sectionne les mains douces et remballe les dons.
Mais peut-être que cela cessera un jour. Peut-être.
Après tout je vais peut-être mourir quand même pour de vrai ? Qui sait ?

11 septembre 2007

Silences

Dans la boîte aux parois lisses
- le grain aigüe raye -
vaisseaux en zébrures rouges qui lacèrent le regard.

Et ce bruit
-
ce bruit qui cogne, cogne
-
cacophonie des mots
-
démons d'avant
-
avant le premier,
avant le dernier
mourants accrochés à la putréfaction de leurs chairs
choeurs chaotiques
oubliant la vie,
la vie si lisse et souple, si belle et douce, si pugnace et tenace, si proche et lointaine, la vie qui harcèle, la vie qui lacère
-
la vie vocifère
et se terre
au fond de la boîte
la boîte aux parois si lisses
si lisses
-------

11 septembre 2007

Vol en ligne

Elle avait pris une voix de gamine ;
- tu viens dans mon camp ?
Cela avait remué quelque chose en moi, parfum carambar et tête à la réglisse. Goût choco BN aussi. Et j'avais dit oui. Oui oui, je veux jouer ! Il a quand même fallu m'en rappeler les règles, en 40 ans j'avais tout oublié ! Voyons...au ballon prisonnier, on fait quoi déjà ?
Mais oui ! il faut toucher ceux de l'autre camp avec le ballon ! et s'il le laisse s'échapper, il est prisonnier ! Et alors il va en prison, derrière, puis il essaye de toucher à son tour pour se libérer, et tout et tout et tout ! J'adore ! Même sans la cour de récréation, les couettes, la blouse à carreaux roses, j'adore !
Et depuis je marche en boitant. Et je m'assoie sur un coussin moelleux, monte les marches à petits pas précautionneux et grimace sur mon vélo.
Pourtant j'ai adoré jouer au ballon prisonnier, vraiment adoré. Je me suis laissé prendre au jeu, aux éclats de rire.
Sauf que, quand on lance le ballon, il ne faut pas oublier qu'on est alors sur des roller.... et non plus en mocassins et socquettes. Mon coccyx s'en souvient.  Même massé à l'arnica.
On a gagné ! on a gagné !

9 septembre 2007

Au joueur de dames,

    c'est facile, pas vrai ? Un vrai jeu d'enfants !
Quand tu as commencé à jouer avec moi, je savais déjà que je n'avais pas à faire à un débutant. Un vrai homme à dames, c'est le tatouage de ton regard qui me l'a dit. Jouer le jeu du droit dans les yeux, du mitraillage au  flash, dix chiffres à pianoter sur un clavier, un pour chaque doigt, enfantin. Les règles sont simples. Et nous n'avions pas dit que sauter n'est pas jouer.
Pas bien compliqué de me suivre dans mon lit. Le damier était tout tracé, un pas devant l'autre, même en diagonale, celle des fous qui oublient qu'ils ne sont pas sur un jeu d'échec.
On couche bien les poupées dans leur landau et les lunettes dans leur étui, on couche les mots sur des lignes, et même le soleil se couche dans la mer.
Mais tu t'es trompé de jeu, mon joueur de dames, en me disant "je t'aime". Il suffirait donc de me prendre dans ses bras et de se coucher en moi pour m'aimer ?
Je n'en veux pas des mots convenus, de mon con venus.
Tu crois qu'un jour je pourrais alors te croire ? si tu venais à m'aimer pour de vrai ? pour de tout ? pour de moi ? Après m'avoir dit ce même "je t'aime" ?
Tu aimes les dames, et tu t'es trompé de jeu avec moi.
Je suis une femme.

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7 septembre 2007

Bonsoir, vous désirez ?

Seule une lumière jaune filtrait à travers les persiennes. Et je lisais, allongée dans le canapé. Quelqu'un venait de frapper à la porte. J'avais sursauté. Ce n'était pas une heure commune pour une visite imprévue. Il était juste suffisamment tard pour que la nuit se sente libre de noircir le silence. Je crois même qu'il était trop tard, mais je n'ai plus vraiment de certitude, et je n'avais pas pensé à regarder l'horloge.
J'ai quand même entr'ouvert la porte, après tout la lumière signait ma présence.
Il était beau, diablement séduisant. Avec un sourire... le même que certains psychopathes doivent avoir pour réussir avec autant de brio à convaincre leurs proies de les suivre. Le problème c'est que je n'ai pensé à tout ça qu'après. Sur l'instant j'avais été naïvement séduite par l'inconnu qui avait frappé à ma porte. Un jean, un polo pâle, et un sourire à faire tomber les bobinettes de sécurité les plus perfectionnées. Pourtant je n'étais pas en rouge, ni chaperonnée. Mais la bobinette chût quand même.
Quand je fis taire la jeune princesse qui attendait son prince charmant sur son beau cheval blanc, je finis pas articuler un
- Bonsoir, vous désirez ?
Une petite voix répondit dans ma tête,
- Tu fais quoi s'il te dit, je vous désire, vous hein ? tu fais quoi de ta stupide question ? 
Mais il ne répondit pas "vous"...
- Veuillez m'excuser de vous déranger à l'improviste, je suis très las. Acceptez-vous de me donner un verre d'eau ? Vous êtes ma dernière visite, la nuit ne fait que commencer, et je n'avais pas envie de vous prendre par surprise. (...)
Là, j'avoue avoir eu un battement de cœur. Me prendre par surprise ? Il m'avait entendue penser ou quoi ?
- Oui, je vous ai bien entendue.... mais je n'ai pas de cheval blanc à garer sur le trottoir en réalité.... Je me présente, la Mort. Oui, la Faucheuse. Celle là même. Mais j'ai évolué au niveau de mon look, vous savez !
Et il entra.
J'étais devenue toute molle et pas du tout glacée d'effroi. Pourtant il y aurait eu de quoi. La Mort ? Mais j'étais en parfaite santé, moi ! Même mes sacro-saintes cigarettes n'avaient pas encore eu le temps d'attaquer mes poumons depuis...
- Depuis vos 13 ans. Cela fait un sacré bout de temps, pas vrai ? Les fumeurs ne meurent pas tous d'un cancer, vous savez ! Vous ce sera le cœur. Normalement dans... voyons... deux heures. Ca nous laisse un bout de temps à papoter !
Papoter avec la Mort. Et pourquoi pas faire...
- Avec plaisir, je vous trouve très séduisante et j'ai eu une journée très pénible aujourd'hui. Des vieux accrochés à leurs couches puantes après avoir emmerdé leur monde tout au long de leur vie, un salopard qui battait femme et enfants et qui a crié "maman" quand je suis venu m'assoir à côté de lui en voiture. Bref, une journée pénible. Aucun pour me remercier de ma visite. Sauf la belle-fille d'un vieillard, mais elle n'a pas osé le dire tout haut, et elle a même fait semblant de pleurer après !
J'avais été lui chercher un verre d'eau dans la cuisine. Il m'avait rejoint de son pas souple, avec un mouvement de bassin à damner une sainte...ce que je n'étais pas ! La Mort, j'étais en train de fantasmer sur les hanches de ma Mort à moi !
Il sourit. Évidemment ! J'avais oublié qu'il lisait dans mes pensées...
Deux heures.. Bon, de toute façon je n'avais plus le temps d'écrire un testament.
- J'aime beaucoup ce que vous avez écrit sur le mur de votre chambre. Ces vers de Baudelaire... une merveille.. "Nous aurons des lits profonds comme des tombeaux...."
- Vous connaissez ma chambre ?
- Oui, j'étais passé par là un soir, mais il n'y avait personne, j'ai voulu visiter. J'aime bien savoir où vivent ceux que dois faire passer de vie à trépas. Surtout quand il s'agit d'une femme aussi séduisante que vous.
Deux heures....
La Mort me prit par la main et je crois bien que j'étais déjà nue à ce moment là. Après tout pourquoi n'aurait-il eu qu'un seul pouvoir ?
Deux heures ? Non, cela avait duré, avait implosé, avait fulguré. Et m'avait anéantie.
Je me suis réveillée ce matin, les cheveux froissés, la peau salée. J'ai souri en pensant à ce rêve sublimement érotique qui m'avait fait jouir dans mon sommeil et venait de me réveiller.
En allant dans la cuisine chercher un café, j'ai trouvé ce petit mot.
- Il est des moments de grâce qu'il faut savoir préserver hors du temps. Je reviendrai. Et je frapperai à votre porte, mais vous n'aurez pas peur, n'est-ce pas ?


Inspiré d'une nouvelle de Navajo M., avec son accord.
Règlements de contes, édité par «  Les éditions universelles »

5 septembre 2007

La configuration du mâle

Clitoris ; elle n'arrête pas de parler de moi, vous entendez ? J'adore, ça me titille de partout partout.
Cerveau ; et bien calme-toi, parce que ce n'est pas de toi qu'elle parle, mais de la fonction clitoridienne en général. Pour son débat de ce soir.
Clitoris ; vous chipotez, chef, elle n'a qu'un clitoris, c'est moi. Et si elle veut en parler, elle va bien être obligée de partir de son expérience ! Donc de moi, hé hé !
Neurones ; ah non, justement ! Elle a demandé qu'on mette tes connexions nerveuses au repos le (...)
Clitoris ; noooon ! elle n'a pas le droit ! Je veux vivre librement ma vie !
Neurones ; que le temps du débat, ne te fais donc pas de souci.
Clitoris ; ouf, vous m'avez fait une de ces peurs !
Yeux ; et bien, si tu as peur pour ça, heureusement que tu n'as pas lu ses recherches sur l'excision, mon chéri....
Clitoris ; brrrr, quelle horreur ! J'en ai entendu parler, c'est horrible. Tout ça parce que les hommes trouvaient que je ressemblais à un pénis. Une malformation, quoi.... Et c'est pour ça qu'on me coupait... brrr, j'en ai la chair de poule.... Je suis bien plus joli et sensible qu'un simple pénis ! Et presque aussi grand...
Réseau nerveux clitoridien ; c'est confirmé. 11 cm en moyenne. Très très sensibles. Pas comme eux... tout est concentré dans le gland, les pauvres....
Clitoris ; que j'aime quand on parle de moi, j'aime j'aime j'aime....
Cerveau ; tu vas pas devenir comme Ego et tout ramener à toi !
Ego ; mais enfin, c'est incroyable ça ! Même quand je ne dis rien il faut que vous fassiez des remarques désagréables sur moi ! Laissez-moi vivre ma vie tranquillement et occupez-vous de votre armée, Monsieur le Commandant Suprême. Jusqu'à nouvel ordre je n'ai rien à voir avec vous. Heureusement d'ailleurs...
Cerveau ; tout a à voir avec moi, pauvre stupide, tu aurais mieux fait d'écouter un peu mieux les leçons pendant notre constitution utérine, ça (...)
Elle ; dites vous allez arrêter, je n'arrive plus à me concentrer sur mon exposé. Le côté féminin passe encore, mais alors la partie mâle... je galère, je galère.... Bon, qui peut me dire si le sperme passe par l'urètre ou l'uretère ? Impossible de me souvenir.
Cerveau ; ben, c'est à dire que... le sperme... c'est pas dans notre configuration, hein !
Elle ; décidément vous êtes des dilettantes. Bon, Wikipédia me sera plus utile que vous. Je commence à me demander si je vais être capable de co-animer ce débat, moi. "L'orgasme, point d'orgue du plaisir ? "... quelle idée j'ai eu de lancer le thème en rigolant... J'aurais mieux fait de me taire. Et de me contenter de faire des travaux pratiques, c'est sûr.

3 septembre 2007

Fantoche

Tu crois que je pourrais encore abandonner ces résistances au parfum de rouille amère ? et enrouler dans une tête de loup les éclaboussures de mes émois perdus ?
Tu crois que je saurais égarer la clé de cette boîte à mémoire noire des douleurs accumulées ? et dormir sans brûler ma peau à ton corps étranger à mon ventre ?
Je ne sais plus, je ne sais pas.
J'ai perdu le fil de l'histoire au gré des contes défaits. Mon sourire s'est coulé d'étain et mes yeux de cuivre. Je ne sais plus m'émerveiller et être la belle endormie au sourire aux anges.
Je me suis égarée en cherchant la source où diluer mes peurs, et j'erre au bord de la vie, le talon d'Achille endurci, la nuque trop lourde.

Mais toi, vois-tu qui je suis ?
Tu ris de mes cris, la nuit, et de mes silences qui s'étranglent.
Tu ris de mon corps qui balance ses hanches, et de ma peau qui se consume.

Je suis un pantin qui désarticule sa mort à venir.
Regarde, là haut.
J'ai accroché le bois et noué les ficelles de ce fantoche qui me maintenait dans l'illusion.

2 septembre 2007

Chimote du soir

Il y avait les feux follets échappés des braises au parfum de couenne rôtie, et, tout à côté, la couverture rebrodée de pivoines rouges.
Il y avait cette vapeur salée des chairs qui se frôlaient et dansaient au rythmes balancés de l'Afrique et du Brésil. Et les pieds engourdis de taper le sol.
Il y avait cette confiture de lait, cette Chimote, sublime dulce de leche, dans laquelle mon doigt plongeait avec délice.
Il y avait ces femmes au ventre gonflé de désirs inassouvis, dont le regard s'arc-boutait aux yeux des hommes.
Et celui d'un homme qui se cachait derrière un calashnikkon et fabriquait des pixels de regards de braise.

Il y eut la cuillère à pot, pour gourmandise à satisfaire toutes affaires cessantes. Et le pot de dulce de leche tapissa ma langue et mon palais de sa sublime douceur caramélisée. Et l'homme regardait.
Il y eut la bougie aux phéromones, celle qui éloigne les moustiques, sauf les mâles.
Et il y eut un petit livre ancien, le petit-livre-train que je garde précieusement depuis 50 ans, depuis mes 50 ans, parce que c'est écrit dessus : "les histoires d'amour c'est comme les voyages en train". Alors j'ai appuyé sur le nez de la locomotive, j'ai bien entendu son "pouêêêt".
Je reconnaîtrai son bruit, j'en suis certaine.
Il n'y eut pas de locomotive, ni de TGV, mais cela tangait comme sur l'Océan. Peut être que les sirènes des cornes de brûme font ce bruit, pour les instants d'égarement ?
Mais j'en ai déduit que ce n'était sans doute pas une histoire d'amour comme celle du petit train. Mais une jolie petite histoire comme une bouteille à la mer. Une qui se termine en surprise-party dont on revient indemne, une qui se consume sans cendres à glisser dans des linceuls couleur d'amours défuntes. C'est certain. 
Alors j'ai été voir ma girafe qui se désarticule ; elle se tenait plus droite que jamais, c'est un signe, ça. Je l'ai embrassée sur le bout du nez et j'ai chaussé mes lunettes à double-foyer pour vérifier la date de péremption des objets soigneusement emballés. Tout était ok.
J'ai allumé mes lampions ultra-violets, pour mon bain de minuit au clair de lune. Et j'ai souri.

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