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Eau vive
9 juillet 2007

Monsieur le chef du personnel,

   je vous remercie d'avoir bien voulu m'accorder cinq minutes de votre précieux temps. Il est vrai que c'est la troisième fois en peu de temps que vous assistez à mes échanges officiels, par voie hiérarchique, avec copie à qui de droit et bla et bla et bla. Sur des sujets qui me fâchent.    
Hélas, mes mails sont de plus en plus concis, en une prose teintée d'un humour potache, bref mes  correspondances sont de plus en plus... cinglantes. Et changent du fameux politiquement correct qui est de mise dans notre administration. 
Pourquoi m'avoir demandé si le temps béni de mes vacances approchait ? Avez-vous peur que je n'explose, telle une cocotte-minute dégueulant sur votre moquette mes tableaux de variables, mes fax hors d'usage et ma calculette nouvellement fournie ?
Avouez le, Monsieur le chef du personnel et de ce matériel qui n'est pas qu'humain, je vous fais rire. Moi aussi, je vous le confirme. Le duel que nous nous livrons devient morceau d'anthologie. Et j'y ai déjà gagné un fax flambant neuf.
Aujourd'hui, j'ai déposé - soulevant au passage un nuage de feuillets- avec un de ces gestes brusques qui caractérisent mon humeur quand elle se chiffre en kilo-bar, j'ai donc jeté déposé sur votre bureau ma calculette, communément appelée "l'objet du délit". Celle qui m'a été fournie en remplacement de feu la précédente (paix à son âme).mon_antiquit_
Un bon kilo, non ? Et presque un format A4. Tellement pratique quand j'ai le téléphone coincé sous l'oreille, un document litigieux sous les yeux, un crayon dans la main, et la foutue calculette à gauche (ben oui, la prise est à gauche). Là, c'est une question de souplesse, mais j'y arrive.
Quant au fait qu'elle ne soit pas portative....mon équipe va adorer ce que vous me préconisez ! Vos conseils sont précieux, Monsieur le chef du personnel. Bien sûr ! dirait Maigret, il suffit que je leur fasse ouvrir la magique calculette informatique de Windows, suis-je bête ! et de m'assoir à leur clavier. Ils vont aimer, j'en suis sûre. Attendre debout que j'ai fini, ça va leur délasser les jambes. C'est tellement plus simple qu'une calculette, tellement. Et puis j'imprimerai aussi la page écran où il y a des chiffres litigieux, parce que la merveilleuse calculette informatique, elle n'aime pas rester collée à une page-écran. Mais bien sûr je peux cliquer 15 fois dessus, dans la barre des tâches... C'est tellement plus simple qu'une calculette normale, tellement...
Je l'ai bien remarqué, votre bouche s'est ouverte au même moment que vos yeux s'écarquillaient devant mon antique nouveau matériel. Je pense que vous n'aviez pas bien compris avant de la voir..... Non, vous avez résisté à la tentation de fou rire. Moi, j'ai bien ri quand on me l'a donnée, mon antiquité.
- Regardez, elle a 30 ans, et elle marche ! Si si, elle marche ! Je la branche... Vous avez bien une prise de libre? Écoutez le joli bruit ! C'est le moteur qui entraînait - à l'époque où il y en avait - le petit rouleau de papier où les opérations successives s'affichaient. Écoutez encore ! Grrrrrrrr ! À chaque touche appuyée. Grrrrrrr.  J'arrête ? Soit.
Cessez donc de contenir votre rire, je ne suis pas sur la scène d'un cabaret. Oui, je sais, c'est votre prédécesseur qui a voté les budgets. Oui, je sais, une calculette nor-ma-le a déjà été refusée à deux autres personnes. Mais moi, je vous donne 15 jours. Avant de lancer un mail à diffusion générale.
Avec un joli montage photo... de moi, votre dévouée responsable d'un job où je passe des journées à manier des chiffres (ça a son importance, merde), en robe chinoise, un boulier à la main, à mon bureau .
Je vous assure que je le fais.
C'est drôle, j'ai cru comprendre que vous me croyez.
Vous m'avez promis de chercher dans vos tiroirs, chez vous. Comme vous l'entendez. Mais je veux des piles neuves dedans. Vous êtes prévenu. Je refuse d'investir 10 € pour bosser dans des conditions normales. Même 1€ d'ailleurs.

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7 juillet 2007

La paix chamarrée

J'ai recouvert mes idées noires de rayures vertes, chiffonnade de laitue acide pour limace tenace. J'ai décapé mes colères froides au White-spirit, laqué ma morosité d'un rouge brûlant, vernis de jaune ma peur, et drapé de lilas mes cauchemars. Les rayures fraîches et odorantes cinglent mon humeur de leurs éclats collants, et mes empreintes ont gravé de colimaçons le silence qui éclate.
J'ai peint, pour mon demain dont je n'ai plus peur, les couleurs d'un printemps artificiel, aux mots chamarrés de vérités, aux désirs consentis à la lumière de la vie.
Peu m'importe que tu sois troublé ou déboussolé, et que tes insomnies gonflent en montgolfières tes pensées érotiques adultères.
Je suis en paix et mes pinceaux rayent le bois d'odeurs fortes, de couleurs vraies et primaires.
Comme moi.

5 juillet 2007

Vous ne le savez pas encore

Demain, à l'heure où l'aube est à peine dissoute, où la lumière trace des ombres claires, demain, vous me rejoindrez, à cette terrasse de café familière. Les croissants, encore deux je vous prie, la mousse amère, le livre feuilleté, tout a déjà été filmé. Toi aussi, tu veux un autre café ?
Demain, nous longerons le canal. Vous regardez mes hanches qui se balancent, ma tête qui se penche, et nous nous rabattrons, penauds, pour laisser filer les cyclistes avertis et pressés.
Vos joues auront une couleur plus vive quand je m'approcherai de l'accueil, précisant les heures, notant un code robotisé. Vous me suivrez sans dire un mot. Vous détestez ce couloir, n'est-ce pas ? Vous fermerez la porte, et j'entendrai votre soupir imperceptible, celui de vous sentir enfin en sécurité.
Vous m'enlacerez, vous me serrerez plus fort que jamais. Car vous craignez les heures qui s'approchent où je disparaîtrai pour toujours. Ces heures qui m'apaisent et vous oppressent.
Vous me direz des mots si beaux, des caresses si douces, que ma peau en crépitera étincelles, et mes soupirs vous enivrerons. Vous m'aimerez, me lirez de la poésie, vous me ferez rire et m'émouvoir de vos yeux qui s'embuent si souvent. Vous ferez semblant de croire qu'aimer est étrange et vain. Vous vous raccrocherez à vos certitudes qu'un avenir aurait été impossible. Et vous m'aimerez de toutes vos forces, de vos mots de manque, d'amour. Comme d'habitude.
Demain sera la dernière fois.
Mais vous ne le savez pas.

3 juillet 2007

Mon amie,

    tu me l'as demandé si gentiment, si doucement, souriant de ta voix, au loin.

"Un petit macramé, pas plus grand qu'un ticket de métro, tu sais".
J'ai eu un peu honte de moi, de ce couvre-lit qui a brûlé aux feux de l'été. Honte de me sentir si vide que le don le plus infime est trop lourd à extraire de moi. Honte de mes mains vides, de ces heures qui s'écoulent, où je ne fais rien. Rien. Ni lire, ni écrire, ni écouter de la musique.
Rien. Sais-tu seulement ce qu'est le rien ?
Que ces cigarettes incandescentes qui carminent mes lèvres.
Que ce regard en billes de plomb terni.
"Un petit macramé, pas plus grand qu'un ticket de métro, tu sais".
J'ai ouvert le tiroir secret, et j'ai cherché le fil, l'aiguille, le noeud dont le dessin aurait été créé pour toi.

Rien.
Les bras ballants, les mains vides, le coeur rétracté, les rêves dissouts. Je ne sais plus rien offrir, tant j'ai ce vide en étoile noire dévoreuse de matière, ce vide qui me rend invisible.
Je crois que je préférais ces heures rouges qui palpitaient douloureusement, ces heures scintillantes des sillons évaporés, ces heures bleues, vertes ou jaunes. Ces heures où le temps avait des couleurs, des goûts et des odeurs.

J'ai perdu le sens des mots à tresser entre eux.
Un rien à l'envers, un rien à l'endroit, amer, le macramé a perdu sa matière et le chanvre me brûle les doigts.

3 juillet 2007

Le cyclope

C'est un géant. Qui s'amuse de sa stature, de ses épaules, et de ses pieds qui butent sur les marches toujours trop étroites pour son 47 au bout des orteils. Il fait un drôle de métier, il est photographe d'évènements. Mais ce soir là, il était un ami parmi d'autres. Quand il  vous parle, ses yeux vous regardent sans bouger, mais sa main a une autre vie, et danse de son regard brillant de curiosité. Toujours pourvue d'un  appareil photo, elle vole, s'abaisse, se lève, et les déclics jouent leur samba. Il a plusieurs yeux ce géant là.

L'on s'habitue très vite aux éclairs incessants, ceux qui ne sont là que pour distrairent l'attention, sont le leurre propre à faire oublier le flash qui saisira l'expression, le mouvement du rire ou de la danse, la larme qui perle et s'évapore aussitôt. Des centaines de fois, son doigt appuiera. Pour quelques clichés dont l'éclat de vie sauront émerveiller.
Il y avait le saxophoniste, et les braises du barbecue dont les brandons éclaboussaient la nuit. Il y avait les assiettes de carton et les brochettes de chamallow pour les enfants. Une soirée comme tant d'autres, dans un joli jardin de banlieue.
Les flûtes furent amenées sur les tables de papier où des épis de blé, symbole de vie, étaient posés. Le géant déposa son appareil, souleva une grande bouteille de champagne, les conversations moururent dans quelques soupirs. "Pour vous, quelques bulles, pour fêter la belle nouvelle. Il y a quelques jours mon dernier scanner a montré que mon cancer était guéri. Buvez mes amis, à la santé, à la vie, à ma compagne qui m'a toujours soutenu."
C'était une belle soirée dans un jardin de banlieue. Certains se levèrent, dirent leur douleur, leur combat, leur fatigue. Tous unis par cette envie de partager. Un peu de réconfort, une flûte de champagne, quelques gâteaux entre deux chimio.

Alors, tu vois, petit papillon bleu, je voulais te dire que j'ai bu pour toi, parce que tu es toujours vivante, ici, à l'abri de mon coeur. Quand tu me parlais de ton groupe de paroles tu pétillais de joie : ils étaient si importants pour toi, là bas, ceux qui étaient là, quand ça n'allait pas. Avant que tu ne reviennes ici t'évader de ton cocon.
Papillon bleu, j'espère à mon tour pouvoir donner un peu. Tu vois, je garde tes derniers mots toujours vivaces "donne, l'amour ne doit pas se garder".

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1 juillet 2007

Les cubes...

... ne sortent pas qu'à l'apéritif...

Ces cubes là sentent l'essence et l'huile qui surchauffe dans les routes trop pentues. On les croise parfois à l'heure de l'apéritif, mais tranquillement assis autour d'un bon verre, ayant squatté la table d'à côté comme vestiaire.
Quand j'ai créé ce groupe de possesseurs de 125cm3 je pensais trouver juste un ou deux comparses prêts à se promener en ma compagnie. Et j'ai compris que nous étions nombreux à aimer pétarader dans les alentours proches de Toulouse [ là où l'on trouve des gorges rocailleuses, des montagnes, des lacs et tout plein de forêts ,et que notre région est superbe, qu'on se le dise ! ]
Un G'ros cube me demanda gentiment-poliment [ ma 1100 est en rodage] l'autorisation de nous accompagner lors de notre balade bucolique. Esquissant un sourire, j'acquiesçais ; après tout, un embrayage en surchauffe, du moment qu'il n'est pas sous ma selle à moi.... Puis un autre introduisit le bout de son carénage de puissante, tout aussi humblement [elle est vieille, très vieille, elle n'aime pas aller vite ]. Cela devenait amusant ! Dans le groupe des cubes, le grincheux de la bande fut remisé en compagnie des araignées, et tout le monde apprécia de doubler tour à tour ces monstres roulant en seconde et relayés au rang de moto-balai. J'ai compris pourquoi nous avons été phagocytés par ces grosses cylindrées...Nous, nous faisons de vraies balades... Avec tout plein de pauses dès que le coin nous plaît. Tout plein ! Et nos pique-nique suivent nos envies.. Pas de road-book à suivre minutieusement... de toute façon je me perds partout et chacun a pris l'habitude de mes gestes contrits indiquant qu'une demi-tour était à prévoir....
J'adore le groupe des P. cubes... surtout quand un débutant nous rejoint pour sa première virée, les tripes tordues de trouille ! L'histoire du Ptit poussin blond est exemplaire....
Elle arriva, sur sa petite monture toute neuve, accompagnée de son mari-poule... qui chevauchait sa routière nerveuse et très puissante. Il voulait quand même voir à qui il allait confier son poussin adoré maman de leurs trois enfants [ on ne plaisante pas, hein !]. Rassuré par mon côté vétérante il rentra chez lui après les derniers conseils d'usage [le quinconce, toujours en quinconce, et pas de panique j'arrive en cas de problème, tu as des bonbons dans ta poche, et ton téléphone chargé...]. Nous voilà partis, encadrant de notre vigilance les mèches bondes qui sortaient du casque.
Ce fut à l'heure du pique-nique que nous avons compris ce qu'était un mari-poule.
Quand Ptit poussin blond nous avoua, éclatante de bonheur de la balade, mais les joues toutes rouges, qu'elle avait les bras trempés. Trempés? D'accord il faisait bon, le soleil brillait, d'ailleurs une baignade était prévue, mais quand même ! Alors, nous avons pris son beau blouson neuf. Et nous nous sommes écroulés de rire...  Mari-poule avait soigneusement attaché la doublure-hiver, et pourvu le cou de son adorée d'une cagoule en polaire doublée Gore-Tex, au cas où une abeille et un vent coulis aurait eu l'idée saugrenue de passer par là... Puis nous avons réalisé que nous encadrions une bombe ambulante quand elle a sorti de son sac une bouteille remplie d'essence... Au cas où... pensez-donc... nous aurions pu lâchement abandonner Ptit poussin blond au bord de la route, moteur à sec !
Le soir, je l'ai raccompagnée jusqu'à son poulailler, la jolie motarde heureuse, et croyez-moi que mari-poule était à la grille, le regard fixé sur la route, fier et soulagé de voir son Ptit poussin blond rentrer intact !
A la prochaine sortie, elle revient, mais a promis de ne plus se transformer en bombe....

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