La goutte d'airain
Je le sais bien, tu n'y peux rien. D'ailleurs tu ne peux pas savoir, comment pourrais-tu ? Je ne peux pas te parler, ni rire du sacrum en piteux état, et tempêter sur la moto où les araignées vont tisser leur toiles trois semaines durant.
Pas un mot de ce week-end où la solitude me mijote des heures longues.
Tu n'as pas entendu mes sanglots, quand j'ai trouvé sa chambre vide, et sa lettre. Oui, il est parti, la vie ici était trop dure pour lui. Tu l'aimais bien. Il m'a laissé une lettre tu sais, émouvante comme seuls les gamins perdus arrivent à écrire. Et ses sms après, juste pour rajouter les jtm qu'il avait oubliés.
Mais tu ne sais pas tout ça. Tu ne sais rien, de ma vie de ces moments là. Puisque tu n'es pas là.
Et pourtant je sais bien que cet instant là est perdu, il se meurt, broyé dans un coeur trop lourd de ces heures vides. Ces secondes s'échappent, où je t'aurais donné tout ce que je suis aussi, et qui se terre si souvent en silence. Quand je reste là, si démunie et fragile. Avec mes sanglots que je ne cherche pas à taire. Avec cette cigarette qui s'embrase et mes doigts qui s'échappent de mes pensées. Devenue un simple contour, statue de marbre incolore, assise, les yeux vides. Lourde, si lourde et éphémère tout à la fois.
Je me serrais glissée dans tes bras et tu m'aurais entendue murmurer serre-moi fort, très très fort, s'il te plaît, j'en ai tellement besoin.
C'est un drôle de moment, qui me scelle d'une goutte d'airain, pour taire à jamais mes besoins.
Tu n'es pas là. Et tu me manques.