Au niveau de l'accueil j'avais tenté le plus que parfait. Cohabiter bureau contre bureau, même paysagé, demande un peu de partage.
Elle, ancienne prof ayant démissionné de son ministère. Elle, dix ans de moins, sans compagnon, ni enfant [ c'est trop de "taf" ]. Moi, mère de famille nombreuse... Chacun sa vie, cela m'indiffère.
Mug à disposition, café à volonté, croissants, débriefing sur les us et coutumes de la boîte.
Et je continue ma petite vie un peu speed dans mon boulot. Speed et totalement autonome. Chef a quand même demandé que je sois là pour l'aider dans mon domaine de compétence. Sans souci, j'y ai été nommée "référente", c'est normal.
Les journées passent. J'ai un peu de mal avec ses petits rots continus. Même beaucoup de mal. Mais un de mes enfants m'a expliqué que dans certaines sociétés cela était normal. J'ai donc fermé les oreilles. Mais c'est dur, je vous assure que c'est dur....
Ensuite je l'écoute parler d'Ikéa. Et d'y aller en bus. 25km, dont 10 de rocades, cela menait la visite à 4 heures de transports en communs divers et variés. Sans compter l'impossibilité d'achat. J'avance la possibilité de prendre une demi-journée de congé pour l'emmener.
Trois jours avant...
- Ben... j'ai pas fini de ranger mon appart.... [depuis 3 mois ]... je préfère la semaine prochaine.
Il ne faut pas rêver, j'avais posé l'après midi, j'en ai profité pour moi. Et n'ai pas refait de proposition.
Un mois passe.
Clash sévère au boulot. Succession de reproches tellement étonnants que je n'en crois pas mes oreilles. J'ai stoppé illico le déballage à deux, avec mise au point avec notre chef, concerné au plus haut point. Elle faisait une vraie scène de jalousie, qui m'a laissée pantoise. Oui, je travaille avec lui depuis longtemps, nous nous entendons bien professionnellement, fumons nos clopes ensemble, mangeons ensemble [ elle a été conviée à ce joindre à nous et à notre bande-cantine dès le premier jour ]. Mais c'est mon chef, lui et moi le savons. Et nous n'avons jamais eu de souci hiérarchique ! Il n'y en a, paraît-il, que pour moi. Elle se sent délaissée, mise à l'écart. Dieu-du-ciel-Jésus-Marie-Joseph, mais quelle idée de tout regarder comme ça ! Nous n'occupons pas du tout le même poste ! Sur quel bureau est posée la pile de magasines ? Mais flûte, sur le mien, parce que je les survole ! Et les lui passe en suivant parce qu'elle les lit. Tout simplement.
Depuis ?
Elle part en congé mais oublie de me le dire... "à dans 15 jours", ce n'est pas la mer à boire.
J'ai appris la grande différence entre les femmes célibataires de 40 ans et les autres. L'égoïsme. Ne jamais avoir eu besoin de partager son temps avec l'autre. Être toujours dans la seule situation qui a été vécue, celle du recevoir.
Je me tais au maximum. Pars boire le café avec de vrais collègues-amis sans plus me sentir obligée d'attendre. Ai demandé un bureau seule, dans la catégorie "je suis une asociale". Demande agréée, mais mise au point mort par chef. Qui ne supporte pas l'idée que je sois à plus de dix mètres de son bureau. Porte parfois des écouteurs et un air d'opéra entre les oreilles. Ce qui ne filtre pas les rots, d'ailleurs. Heureusement que les pets ne font pas écho.... .
Chef s'énerve de mon attitude devenue distante.
Je ne plaisante plus avec lui au travers des portes ouvertes de nos bureaux. C'est le chef, je me lève pour lui parler. Et je la vois qui tend l'oreille.
Elle demande "tu sais qui va remplacer la direction" ? Oui, je sais, mais je ne partage plus spontanément toutes mes infos transversales. Je réponds quand même à ses questions, la curiosité lui dévorant les lèvres.
Donner et ne rien recevoir... Je crois avoir atteint l'âge du non retour. Je ne veux plus être emmerdée par les emmerdeurs. Et elle en fait partie.
Un bureau seule, c'est ce que je répète.
Un jour ça va clasher. Mais pour de vrai.
Et je risque de partir en claquant la porte. Chef, tu vas regretter de ne pas me laisser bosser tranquillement toute seule. Tu vas vraiment regretter.