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Eau vive
27 février 2008

Araignée de nuit

Je ris avec eux, bien sûr que je ris. Même si parfois je me moque discrètement de leurs propos. Ils sont ainsi, banals consuméristes de chair triste. Ils soupèsent des yeux, calibrent, marchandent de propos très légèrement graveleux, sans trop, surtout sans trop... afin de ne pas faire fuir la proie tout entière révélée à leur désir primaire.
Et je ris moi aussi. Moi qui voudrais tant qu'elles se respectent davantage, mes sœurs, femmes comme moi.
Mes sourires sont amers devant leur bassin qui frétille, leur langue qui pourlèche le vernis de leurs lèvres fardées. Je soupire et jauge pourtant de mon regard féminin le balancement du fessier, le rebondi aguicheur de seins habilement dévoilés. Je ris et me vomis. Je suis le chasseur et la proie.
Et quand leurs mains se posent sur moi...
Et quand je ne sais plus dire non, pour ne pas toujours creuser mon matelas d'un seul côté, pour ne pas oublier, pour l'hygiène amer d'un corps qui se desquame, quand cette heure inéluctable sonne le glas...je laisse ma peau se scarifier sous leurs caresses vaines. Je ne jouis pour personne qui serait semblable à vous, mon amant d'un soir. Cela me souillerait plus sûrement encore que l'écho de mon rire à vos côtés lors de cette soirée où les femmes n'étaient que viande de supermarché.
Quel morceau étais-je à vos yeux dégoulinant de désir ? Du rond de gîte ? un filet mignon ?
Vous hésitez ?
Je vais vous le dire, je suis ce morceau que l'on nomme araignée...

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26 février 2008

Encore debout

La peine insidieuse suinte d'odeurs acides, pendant que les tourments taisent leurs hurlements viscéraux. Ce n'est rien. Un chagrin en flocons de ouate douce, en ruban de vieille dentelle qui jaunit et se délite inexorablement. Cela me colle à la peau, à l'humeur, cela me tatoue le sourire de ricanements silencieux.
J'ai la haine qui se déguise en amour, la peur de vivre en rage à vivre.
Et je casse de mes ongles la croûte de terre qui a durci, plonge mes doigts dans l'argile sèche, écorche mes empreintes sinueuses sur le gravier aigu. Tentant de blesser mes chairs pour oublier cette douleur qui déchiquette les bonheurs simples.
Je l'entends.
Elle s'approche de moi, froide et chuintante, de son pas feutré.
Non, je ne veux pas que tu viennes, s'il-te-plaît. Je ne suis pas prête, pas ce soir, pas là, c'est encore trop dur.
Le tempo de ma peur chavire au rythme de son pas de loup, sous la lumière dorée de la lune. Et mes paupières se soudent pour rassembler mes forces et me taire devant elle.
Sa main brutale se colle à mes seins, broyant mes poumons jusqu'aux osselets de mon dos. Je n'ai pas encore assez mal, j'ai peur, juste ça. Elle me broie, lentement, si lentement, et mon souffle s'affine en un sifflement rauque. Jusqu'à la souffrance qui submerge en un tour de rein la digue illusoire. Elle a gagné.
Au creux de la nuit, pelotonnée dans la tiédeur moite de mon corps recroquevillé, je laisse les sanglots épais déchirer mes rêves.
Demain je serai debout.

21 février 2008

Iké@, mon amour...

    pourquoi m'as-tu laissée là, toute seule, avec ces énormes cartons ? Tu sais bien, Iké@, que j'ai une toute petite voiture, des tous petits muscles et que cela allait être impossible pour moi toute seule.
Salaud, va !
Qui va pouvoir venir avec sa grosse voiture et ses gros bras m'aider ? Me suivre jusqu'à chez moi, en plus ? Puis sortir du coffre sa merveilleuse perceuse à percussion, et la dégainer d'un geste sûr. Tu sais bien, Iké@ mon amour, que je visse tout de guingois, moi ! Et monter des étagères et une armoire, ce n'est plus de mon âge, merde.
Et pour tes planches qui ne sont pas en basalt, je te le redis, tu n'es qu'un salaud !
Mais après, nous boirons à la santé, mon foutu Iké@, de ton amour en kit et de toutes tes foutues planches même pas numérotées.

20 février 2008

Supplice

Écorchée vive de l’absence de ta bouche,
suintant de cristaux de sueur amère

Tu imbibes de frissons pourléchés
ma mémoire qui se délave
- troubles blêmes -

Et la mousse spongieuse
assourdit le cri rauque de mes nuits.

19 février 2008

Monsieur le Président,

    je voudrais s'il vous plaît, un devoir de mémoire pour ...
les femmes à qui l'on fait la haine, les enfants mendiants, les mineurs silicosés, les homos persécutés, les Tutsi et les Hutus aux membres sectionnés,  les petits contaminés d'avoir voulu grandir, les hommes à qui on a fait croire qu'aimer un pays c'était tuer les étrangers, les handicapés enfermés dans nos villes, les fillettes vendues comme chair à désirs pédophiles, les algériens torturés, les cancéreux amputés, les tibétains martyrisés...
   Je voudrais un devoir de mémoire pour les mendiants dormant sur des cartons, les coréens affamés, les chômeurs de longue durée, les alcooliques qui tremblent le matin, les sidéens qui crêvent d'avoir fait l'amour, les mexicains qui fuient la misère, les drogués en manque, les juifs persécutés, les palestiniens spoliés…
Un devoir de mémoire pour  les rousses brûlées sur les bûchers, les noirs condamnés à céder leur place, les chinoises avortées de force, les russes internés, les verts de peur, les sans-papier...

   Je voudrais, s'il vous plaît, un devoir de faire.
Un devoir pour l'humanité de se pencher sur son berceau, de faire ce qu'il faut faire, là, maintenant, au présent.
Pour éviter de devoir dans le futur faire acte de contrition, acte de mémoire.

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17 février 2008

6 mois et 14 jours

Il y avait tant de monde sur le quai. Toutes ces valises partout, les parents inquiets qui cherchaient le bus dans lequel leur enfant devait monter. C'est vrai que c'était tôt, pour un dimanche. Il était sept heures, ce matin, avec un petit vent bien frais qui s'infiltrait dans les cols. J'étais emmitouflée jusqu'au bout de mon chapeau.
Toi, tu as d'abord vu ma fille. Et tu as espéré, et craint tout à la fois.
Puis je t'ai vu, là, devant moi. Trois petits mètres entre toi et moi.
Et la foule tout autour s'est dissoute brutalement. Tu étais là, si près de moi. Il n'y avait plus que ton regard, et cet énorme silence partout autour. Me détacher de tes yeux... il fallait que je tourne la tête. Vers elle, et l'embrasser, et lui sourire.
- Bon voyage, à bientôt ma fille !
Toi aussi, tu faisais les mêmes gestes.
Et nos enfants sont entrés dans cet autocar aux fenêtres fumées.
Nous avons marché lentement, tellement lentement !  l'un vers l'autre.
Quel film ! Panoramique, zoom. Coupez, elle est bonne.

D'autres nous regardaient, qui savaient, qui nous connaissaient, d'avant que nous nous quittions, d'avant que je ne te fuis, dans cette robe aux fleurs parme.
S'approcher et pour la première fois t'embrasser sur les joues.
Six mois et treize jours , toile arachnéenne de l'absence.

- Bonjour. Oui, allons boire un café.
- Deux doubles s'il vous plaît et deux croissants. Oh, c'était bien ça que tu voulais, au moins ?
Nos rires. Et nos larmes.
- Je t'aime.
- C'est le plus dur, tu sais. Être aimée c'est si facile ! Mais aimer... Oh, que c'est dur de t'aimer. Six mois sans te voir, sans t'entendre. J'avais tellement peur d'avoir oublié ta voix.
- Tu ne m'as donc pas oublié ?
- J'avais peur que tu ne m'aies oubliée.
- Laisse moi embrasser ta nuque, là, juste derrière l'oreille.
- Ton odeur de poire verte !
- Tu me manques tant.
Je pense à toi. Chaque jour.
- Je regarde toujours, là, sur le pont... si jamais...
- Je regarde toujours, là, le long du canal... si jamais....
- Tu es dans mes pensées, chaque seconde.
- Tu es en moi. Là, sans cesse en moi.
Oui, allons dans un autre café. Comme avant. Quand nous étions (...) Rien, nous n'étions rien, viens..
- Es-tu déjà retournée là-bas ?
- Oui, une fois, et elle m'a dit que, toi aussi...

La semaine prochaine, sur le quai, je fermerai les yeux pour ne pas te voir.
Toi, que j'aime et qui manque à ma vie.

 

14 février 2008

Coeur brisé

Tout s'annonçait bien pour fêter notre Saint-Valentin.
Le gâteau embaumait la cuisine, un nuage de sucre glace virevoltait comme des ailes d'angelots transis d'amour. Tout aurait été parfait. Quelques minutes ont suffit. Un excès de confiance en moi, certainement. Je ne peux que m'attribuer l'entière responsabilité de ce désastre. Et tenter de sauvegarder les apparences.
Mais mon coeur s'est brisé.
Définitivement.

DSCF5067 et sa face cachée....DSCF5068  reconstituée...

Ne jamais disposer de la confiture entre deux couches de pâte à génoise avant la cuisson. Simple question d'apesanteur (voir le commentaire ci-dessous) simple question de pesanteur disais-je donc ! Que fait le sucre de la confiture quand il a atteint le moule ? Il caramélise....
Bon, ce sera quand même parfait puisque nous sommes entre filles ce soir ! Et que les filles, c'est franchement moins difficiles que certains autres humains...

12 février 2008

Penche-toi, Ego

Bras ; le premier qui dit que c'est super le printemps, je...
Ego ; c'est super le printemps ! et maintenant tu fais quoi, grincheux ? Tu me gifles ? Hi hi, je voudrais bien voir ça ! "Penche-toi, Ego, que je te flanque une claque".
Bras ;  c'est sûr, je ne peux pas, mais je peux me mettre à gonfler, à devenir engourdi, à avoir besoin d'une attelle...
Cerveau ; mais enfin, ça ne va pas de dire des trucs pareils ? ça pénaliserait tout le monde, ça ! D'accord Elle y est allé un peu fort hier, mais quand même, il faut apprendre à supporter.
Mélanine ; et bien moi je le dis aussi. "C'est super le printemps ! " Alors arrêtez de faire les chochottes, je me sens toute chose avec le soleil... j'adore... pas comme quand elle nous enferme dans son grille-pain...
Bras ; on voit que ce n'est pas toi qui a dû tenir le taille-haie. Madame Mélanine jouait à remonter en surface, à mettre du blush sur les pommettes... et nous, pendant ce temps (...)
Pommettes ; c'est vrai, ça, on est couleur brugnon ! Comme en juin, et pourtant c'est l'hiver il paraît ! Je te soutiens, Mélanine, on ne va pas laisser les grincheux nous gâcher le plaisir.
Peau ; vous êtes sacrément égoïstes, les filles, moi aussi je proteste. Je suis toute rayée de partout avec ce faux printemps. Regardez, regardez bien, les Mains, les avant-Bras, et là, hein ! là, juste sur le décolleté. Tout plein d'estafilades. C'est hor-ri-ble. Elle ne fait vraiment pas attention à nous.
Elle ; mais si, j'avais enfilé un haut qui couvrait bien toutes les zones, mais là... évidemment, quand on est en équilibre sur une échelle, avec ce foutu taille-haie à soulever, ça remonte.
Oreille interne : vous avez vu, Elle, j'ai drôlement assuré, pour l'équilibre, hein, pas vrai ?
Ego ; et voilà le fayot de service qui la ramène maintenant, j'aurai tout entendu, tout !
Elle ; tu as été parfaite, j'étais morte de trouille et je ne suis pas tombée une seule fois.
Cerveau ; oui, et il valait mieux, parce que ces engins électriques qui coupent les branches, je n'ose pas vous dire ce que ça fait sur une Main...
Mains ; mon dieu quelle horreur ! Nous étions malades de peur. Tétanisées sur la poignée.
Elle ; oh là là, que d'histoires vous faites ! Il y avait une double sécurité.
Cerveau ; oui, mais vous étiez à plat ventre sur le toit, la pointe des Pieds sur l'échelle, l'engin amputeur à bout de bras... Vous auriez eu du mal à lâcher quoi que ce soit, y compris la sécurité...
Mains ; je me sens mal, je crois que je vais m'évanouir...
Elle ; bon, je le reconnais, je n'étais pas très rassurée. D'ailleurs j'avais tout bien préparé. Le téléphone dans la poche, le dernier numéro composé à rappeler en un clic. Dans un flot de sang... bip bip bip... ne quittez pas, votre correspondant est en ligne... Bon, j'arrête, je sens que les Doigts blanchissent de peur. Écoutez, on a quand même réussi. C'est beau maintenant. Et qu'est-ce que ça sentait bon, ces petits bouts de sapinettes hachées !
Nez ; c'est vrai, je me suis régalé, tout plein de molécules rares, un vrai bonheur. Et même que j'ai fait de gros efforts pour ne pas éternuer, au cas où vous perdriez l'équilibre (...) 
Ego ; un fayot de plus, un... je n'y crois pas... si c'est le soleil de février qui leur fait ça...
Elle ; bon, on va fêter ça, d'accord ? Ce soir je vous passe de la bonne crème hydratante partout, un peu d'arnica sur les Bras avant, et double couche pour les Mains. Ego, je te ferai un gentil compliment rien que pour toi, parce que je te sens un peu jaloux, là...
Ego ; oooohhh, ben c'est que, quand même, il faut reconnaître que vous avez félicité tout le monde, mais moi...
Elle ; aller, penche toi que je te fasse une bise.
Ego ; mais je peux pas !
Bras ; bien fait pour toi, bien fait pour toi ! La la la la lè re !

6 février 2008

Nausée

Les mots frelatés ont laissé une coulure sale sur les vers
et la poésie a fui dans un relent d'encre décomposée.

J'ai tout lu, et même la pulpe de ceux-là ,évidés des graines d'émotions.

L'amour alourdi de préservatifs a troqué son habit de lumière
pour une coque interchangeable en polyuréthane recyclable.

J'ai aimé, pourtant, et les vers s'en rient, qui rayent les voyelles.

Le temps se compose, sept notes, donnez-moi le la, 
celui de la lassitude des pas qui s'en bémolent et biaisent.

J'ai écrit, et aimé, et crié, bouche avide de mots à vomir.

3 février 2008

Une fleur parme

C'est de la faute à ces soleils charmeurs qui ont réchauffé ma peau de rayons suaves.
C'est de la faute aux nuages presque blancs, et aux oiseaux que j'ai vus dans les arbres, ceux à la gorge rouge comme un brandon. Ils chantaient, les cons, comme Ferré, sur ces gestes des pauvres gens.
C'est de ma faute, je sais bien.
J'y croyais, à cette saison nouvelle, froide et claire, où rien n'empêche la tête des jonquilles de soulever le sol dur de gelée. Comme un printemps. Avec ses stupides violettes qui parfument les jardins publics.
Mais voilà, c'est arrivé comme ça. Un putain de brouillard a franchi le col de ma mémoire. Une nappe gluante, opaque, froide, si tu savais comme j'avais froid, qui a givré mon regard. J'ai vu flou, j'écarquillais les yeux de toutes mes forces, mais je voyais toujours si flou... Alors la peur s'est abattue. La peur qui glace la vie, qui fait comme un caillot dans la poitrine, comme un filet d'eau qui s'épuise loin de sa source.
Parce que tu n'étais pas là, tu comprends, dis ?
J'étais dans cette robe en voile doux, parsemée de fleurs parme, cette robe légère que tu aimais. Parce qu'il fallait que je sois belle, pour notre adieu. Et je flottais dans un rire si léger. Je respirais encore ton parfum de poire verte, sa peau poudrée, son goût âpre.
Je voudrais tellement oublier. Tout dissoudre dans des rires. Et rester debout, bien droite et fière, et faire aussi tant de choses qui les tromperaient tous.
Tu sais pourtant que j'ai tout fait. Je croyais qu'il fallait tout faire, comme si... Même abandonner ma peau à des mains impatientes et tendres. Et jeter au loin ce poids qui courbe jusqu'au sol la joie, le jeter ailleurs, plus loin encore que dans mes mots. Là-bas, dans le silence et l'aveuglement. Surtout ne plus penser à toi.  Oublier cette chaleur irradiante dans tes bras, cette douceur salée de ta bouche aimante, cette paix dans ton regard déposé au creux du mien. Oublier le bonheur intense de nos corps enchevêtrés, de nos rires égrenés, de...
Tu me manques tant.
J'ai peur loin de toi. J'ai peur de disparaître dans ce nuage épais de givre, ce brouillard opaque qui dissout les murs familiers de ma vie, qui me laisse telle une étrangère dans des bras qui ne me serreront jamais assez fort pour t'oublier.
Que m'as-tu volé ce jour là, où je suis partie, dans ma robe parsemée de fleurs parme ?

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